Prix Marcel & Paul Pescheteau

Appel à candidature 2025

Afin d’encourager la recherche dans le domaine des arts du feu (céramique, verre, émail) et de permettre aux meilleurs travaux scientifiques de trouver le plus grand rayonnement, la Société des Amis du musée national de Céramique – Sèvres décernera, pour la troisième fois en 2025, un prix récompensant l’auteur d’une thèse ayant contribué à l’étude et à l’approfondissement des connaissances en la matière, toutes périodes et territoires confondus et quelle que soit la discipline universitaire dans laquelle elle a été soutenue.
Ce prix annuel de 8000 € doté par la maison de ventes aux enchères Pescheteau-Badin est destiné à éditer la thèse du lauréat.

Pour consulter le Règlement du prix : Règlement Prix

Date limite de dépôt des candidatures : 31 mars 2025 
Pour envoyer votre candidature : prix@amisdesevres.com

Les Lauréates

La lauréate 2024 : Inès PACTAT
Inès Pactat
Inès Pactat entourée (à sa gauche) de Patrice Cousin, Président de la Société des Amis du musée national de Céramique et de Brice Pescheteau-Badin

Inès Pactat travaille depuis plus d’une douzaine d’années sur des thématiques liées à la production et à la consommation du matériau verre au haut Moyen Âge. Elle s’attache à caractériser et à comprendre le changement de système de production du verre opéré à cette période en Europe occidentale, selon une approche interdisciplinaire.

Cette recherche a débuté par un master en archéologie à l’Université de Franche-Comté, dédié à une étude archéométrique des verres alto-médiévaux de Bourgogne Franche-Comté, puis par une thèse de doctorat en archéologie, soutenue en 2020 dans le même établissement. Inès Pactat a poursuivi ses travaux sur deux zones-ateliers méditerranéennes, le littoral nord-croate et les Pyrénées, à l’occasion de sa participation au projet ERC GlassRoutes (2018-2020) à l’Institut de Recherche sur les Archéomatériaux (UMR 7065).

En 2023, Inès Pactat a réalisé un premier post-doctorat sur l’artisanat verrier au haut Moyen Âge grâce à un financement du LabEx toulousain « Structuration des Mondes Sociaux ». L’obtention d’une bourse Junior du programme TIRIS (Toulouse Initiative for Research’s Impact on Society) lui permet de développer sur deux ans (2024-2025) un projet centré sur l’Occitanie, intitulé GEMO : Glass in Early Medieval Occitania, hébergé par le laboratoire TRACES (UMR 5608) à l’Université de Toulouse Jean-Jaurès. Ce projet s’appuie sur une méthodologie interdisciplinaire bien éprouvée, alliant archéologie et archéométrie, tout en intégrant également une étude plus approfondie des sources écrites et un volet expérimental avec la reconstitution de fours de verriers au bois et la mise au point de recettes médiévales avec des ressources locales.


Inès Pactat est par ailleurs membre du Comité d’administration de l’Association Française pour l’Archéologie du Verre, dont elle a co-organisé les 8e rencontres internationales sur le thème du verre médiéval en Europe occidentale à Besançon en 2016. Elle est également membre de plusieurs associations dédiées à l’histoire du verre ou à l’archéologie médiévale.


En tant que spécialiste du mobilier en verre médiéval, cette jeune chercheuse est régulièrement amenée depuis plusieurs années à réaliser des études archéologiques et des expertises pour l’Inrap, des collectivités territoriales ou des entreprises privées d’archéologie préventive.

Résumé de la thèse « L’activité verrière en France du VIII e au XI e siècle. Résilience et mutations d’une production artisanale ».

Le haut Moyen Âge constitue une période charnière dans l’histoire de l’artisanat du verre pendant laquelle ont été opérés d’importants changements dans le système de production. Durant l’Antiquité gréco-romaine, la fusion de l’agent vitrifiant (sable siliceux) et du fondant (natron) est réalisée dans des ateliers dits « primaires » qui produisent du verre brut, exporté ensuite sous forme de lingots ou de blocs vers des officines dites « secondaires », chargées de le refondre pour produire des objets manufacturés (vaisselle, vitres, tesselles de mosaïque, luminaire, parure, etc.). La fin de l’Empire romain d’Occident n’a pas affecté ce système rationnalisé dans sa structure formelle, comme cela aurait pu être attendu. Ce n’est que dans la seconde moitié du premier Moyen Âge (VII e -XI e siècles) que l’on observe de véritables transformations, avec l’apparition et l’adoption de nouveaux modes de production.


Ces mutations sont perceptibles à travers la pratique de nouvelles recettes de fabrication en Europe, mais nous ignorons encore largement quelles en étaient les modalités, les causes et les conséquences sur l’économie verrière. Faute de données suffisantes sur les structures artisanales elles-mêmes, que ce soit par le biais de l’archéologie ou des sources écrites, l’évolution de l’activité a pu cependant être appréhendée par l’étude des productions selon différentes approches complémentaires – typologique, chronologique et archéométrique. Pour ce faire, le propos a été focalisé sur les objets en verre soufflé découverts en France et datés entre le début du VIII e et la fin du XI e siècle, c’est-à-dire la vaisselle en verre, le luminaire et le vitrage. Afin de disposer d’un corpus de références suffisamment important et pertinent, la totalité du territoire français métropolitain actuel a été considérée et 114 collections issues de sites de production ou de consommation ont été étudiées. L’identification des différentes matières premières utilisées grâce aux analyses physico-chimiques a été mise en perspective avec l’évolution des productions, de leur forme et de leur décor. La reconstitution de la chaîne opératoire du verre a révélé la capacité de résilience des artisans du haut Moyen Âge qui ont mobilisé des ressources innovantes afin de poursuivre leur art et répondre à une demande grandissante.


La démarche systémique engagée à l’occasion de ce travail doctoral m’a amenée à examiner les connexions et les possibles effets de réciprocité entre chacun des acteurs de l’économie verrière autour de l’an Mil. Au terme de cette recherche, il est apparu que la transition d’un système de production à un autre ne s’est pas faite brusquement, mais plutôt progressivement, sur un temps long que l’on peut scinder en trois grandes phases.

La première (VII e -VIII e siècles) a vu la part du recyclage augmenter de façon significative, jusqu’à constituer parfois l’unique source de matière première. Le recours au verre brisé palliait la déficience de verre brut importé du Proche-Orient. De nouveaux circuits d’approvisionnement ont donc été créés, favorisant l’autonomie des artisans verriers occidentaux.
Mais le recyclage de verres au natron ne pouvait constituer qu’une solution temporaire. De nouvelles démarches ont donc été engagées à partir de la seconde moitié du VIII e siècle pour perpétuer l’artisanat du verre et c’est ainsi que sont apparus en Occident les premiers verres aux cendres de plantes forestières, un fondant presque en accès illimité. À la même période, des verres mixtes, mélangeant natron et cendres calco-potassiques, ont également été identifiés. Certains ateliers ont enfin expérimenté le recyclage de scories vitreuses se formant lors de la métallurgie du plomb et de l’argent aux environs de la mine carolingienne de Melle. Ce n’est réellement qu’à partir du X e siècle que le
système de production du verre semble avoir retrouvé un équilibre, avec l’adoption des cendres de plantes forestières comme fondant principal. Des exceptions ont toutefois perduré jusqu’au XII e siècle, avec le recyclage ciblé de tesselles de mosaïque antiques pour des productions luxueuses (vitraux
bleus et vaisselles colorées à décor blanc opaque).


L’approche systémique développée à l’occasion de cette recherche doctorale a démontré que les phénomènes observés localement et isolément ne peuvent être compris que s’ils sont mis en perspective dans un environnement plus vaste, en considérant les éléments « périphériques », les facteurs extérieurs et les interactions que tous entretiennent.

Ce travail universitaire a enfin prouvé l’intérêt de développer une étude interdisciplinaire afin de saisir toute la complexité de la place de l’artisanat du verre au sein des sociétés médiévales, et notamment les débuts de la production du matériau verre en Europe. Le haut Moyen Âge marque en effet un tournant dans l’histoire du verre avec la maîtrise, pour la première fois, de toute la chaîne opératoire par les verriers occidentaux.

La lauréate 2023 : Lucie Chopard

Le jury a retenu la thèse de Lucie Chopard dont le sujet porte sur l’histoire de la collection Grandidier, un ensemble d’environ 6000 pièces de porcelaines extrême-orientales constitué à la fin du XIXème siècle. Cette collection, léguée de son vivant par Ernest Grandidier au Musée du Louvre, a été transférée en 1948 au Musée Guimet, musée national des arts asiatiques, dans une galerie dédiée.

Mme Lucie Chopard a soutenu le 22 octobre 2021 une thèse intitulée « La collection d’Ernest Grandidier au Louvre (1870-1915) : voir, comprendre, donner à voir la porcelaine chinoise ». Elle a été préparée à l’École Pratique des Hautes Études (PSL) sous la direction de Mme Rossella Froissart.

La collection de porcelaines chinoises d’Ernest Grandidier (1833-1912) a été donnée au Musée du Louvre en 1894 avec comme ambitions explicites de servir à écrire une histoire de la porcelaine chinoise et d’inspirer l’industrie. Ce travail de thèse entreprend de questionner ces arguments historiques afin de préciser l’identification et l’appréciation de ces céramiques. Cette étude fait apparaître, au-delà d’un maillon manquant de l’histoire du goût et du marché de l’art, l’implication de ce collectionneur parisien dans la vie artistique. Cet aspect se développe dans une période marquée par les rivalités européennes, impérialistes et coloniales, et ces arguments se teintent d’accents nationalistes.

Cette collection reste souvent absente de l’histoire des collections du Musée du Louvre ou du Musée Guimet. Elle révèle néanmoins combien la création céramique et verrière française de la seconde moitié du XIXe siècle a cherché à se réinventer par le biais d’inspirations multiples. Des artistes tels que Théodore Deck ou Ernest Chaplet, de même que la manufacture de Sèvres, ont puisé un renouveau technique et formel dans des objets qui leur semblaient étrangers, et auxquels ils ont pu parfois avoir accès du fait de prétentions impérialistes nationales. Le créateur se trouve ainsi inscrit dans un système qui relie les collections, les expositions parisiennes, les musées, les publications consacrées à ces objets et le marché de l’art.

Résumé de la thèse: 

Cette thèse explore la question de l’entrée au Musée du Louvre en 1894 de la collection de porcelaine chinoise d’Ernest Grandidier. Aujourd’hui conservée au musée national des arts asiatiques – Guimet, cet ensemble est un témoin remarquable de l’histoire du marché des porcelaines chinoises à Paris dans la seconde moitié du XIX e siècle et de la muséalisation de ces objets. Son étude, à la lumière des jalons muséaux et artistiques de la période, révèle quelques mécanismes d’appropriation et de perception de la porcelaine chinoise. Au temps des Expositions universelles, de l’élaboration d’une première histoire des arts décoratifs et de positionnements impérialistes et coloniaux français, cette étude interroge également le rôle véritable ou supposé que la collection Grandidier a joué dans la quête de nouvelles sources d’inspiration par les céramistes français.

À l’aide d’un grand nombre d’archives inédites, ce travail retrace le parcours de cette collection et des milliers d’objets qui la composent : sa constitution à Paris à partir du début des années 1870, sa donation au Musée du Louvre et son installation dans les salles de l’entresol de la Grande galerie en 1895, puis son devenir entre les mains de son collectionneur devenu conservateur par les termes mêmes de sa donation. Ces analyses permettent de mieux appréhender le marché de la porcelaine chinoise à Paris des années 1870 aux années 1910, tout en questionnant la démarche du collectionneur et ses volontés, affichées et partagées par le musée, de servir l’étude de l’histoire de la porcelaine de Chine et celle de nouveaux motifs et de nouvelles techniques par les artistes.

Le prix Marcel et Paul Pescheteau des Amis du musée national de Céramique

Marcel Pescheteau, photo fournie par la famille

Marcel Pescheteau, photo fournie par la famille

Afin d’encourager la recherche dans le domaine des arts du Feu (céramique, verre, émail) et de permettre aux meilleurs travaux scientifiques de trouver le plus grand rayonnement, la Société des Amis du musée national de Céramique a souhaité créer un prix récompensant l’auteur d’une thèse ayant contribué à l’étude et à l’approfondissement des connaissances en la matière, toutes périodes et territoires confondus et quelle que soit la discipline universitaire dans laquelle elle a été soutenue.

Ce projet a pu se concrétiser grâce à l’initiative de Chantal Pescheteau-Badin, vice-présidente de la Société des Amis du musée national de Céramique, qui a tout naturellement solliciter le mécénat de la maison de ventes aux enchères Pescheteau-Badin.

Son fils Brice Pescheteau-Badin, directeur actuel de cette maison, s’est associé à ce projet et doté le prix d’une somme annuelle de 8000 €.

La Société des Amis du musée national de Céramique remercie ce généreux donateur et exprime sa reconnaissance en baptisant le « Prix Marcel et Paul Pescheteau » deux anciens membres actifs de notre société.

En effet Chantal Pescheteau-Badin, première femme commissaire-priseur à Paris, avait eu à cœur de continuer la spécialité historique de la céramique développée par son grand-père Marcel Pescheteau, commissaire-priseur de 1911 à 1934 puis par son père Paul Pescheteau, commissaire-priseur de 1939 à 1994, spécialité qu’elle avait élargie, dans les années 1990, aux céramiques antiques, islamiques, chinoises et modernes.

Le Jury

Le Jury se compose:

  • de deux membres de droit :
      • le ou la président(e) de la Société des amis du musée national de Céramique
      • le directeur ou la directrice du patrimoine et des collections, Sèvres-Manufacture et musée nationaux
  • de membres invités en raison de leur compétence universitaire et dans celle de la céramique:
      • Claire Caland, chercheuse en littérature et mythologie pour l’Université de Montréal et critique d’art,
      • Antoinette Hallé, conservatrice générale honoraire du patrimoine, ancienne directrice du musée de Céramique de Sèvres,
      • Barthélemy Jobert, professeur des Universités, ancien président de Paris-Sorbonne,
      • Odile Nouvel, conservatrice honoraire des collections XIXe siècle au musée des Arts décoratifs à Paris
  • d’un membre à titre consultatif:
      • Brice Pescheteau-Badin, commissaire-priseur

En 2023, le jury a examiné neuf thèses de doctorants sur des sujets s’étendant de la Chine à la France, en passant par l’Iran, l’Irak actuel et l’Inde.
Ces thèses provenaient de différentes universités : Aix, Marseille, Bourgogne, Franche-Comté, Paris Seine, Cergy Pontoise, Paris Sorbonne, Picardie et Toulouse.
Elles étaient soutenues par des Docteurs en Archéologie, Archéologie et Ethnologie, Histoire de l’Art, Histoire moderne et Physique de la matière .

Quatre thèses ont été reçues pour le prix Marcel et Paul Pescheteau des Amis du musée national de céramique 2024. L’une était plus archéologique que les autres et s’intéressait au travail des potiers de l’Asie du Sud-Ouest aux 4 e et 3 e millénaires avant n. è. Les trois autres étudiaient les arts du feu européens et couvraient le Haut Moyen-Age, le XIX e et le XX e siècle. Toutes permettaient d’approfondir notre connaissance sur les arts du feu. Elles avaient été soutenues dans les universités suivantes : Paris-Sorbonne, Bordeaux-Montaigne et Université de Franche-Comté

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